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Des Québécois de seulement 11 ans déjà sur le marché du travail
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Des Québécois de seulement 11 ans déjà sur le marché du travail

Certains voient leurs droits bafoués

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Étant donné la pénurie de main-d'oeuvre avec laquelle doivent composer de plus en plus d'entreprises au Québec, on voit un nombre grandissant de préadolescents arriver sur le marché du travail. Mais des experts réclament des mesures afin de prévenir le décrochage scolaire et les abus, rapporte Radio-Canada. 

Une jeune fille de 11 ans prénommée Amanda est derrière le comptoir de la cantine La Grande Gueule, à Saint-Alphonse-de-Granby, entre 12 et 18 heures par semaines. La cantine emploie des adolescents entre 11 et 15 ans, qui comptent pour environ le quart de ses 32 employés.

Au départ, son patron a vérifié s'il y avait un âge minimum pour embaucher des employés. « Des gens m’avaient dit : "As-tu le droit?" J’ai eu un doute. [...] Mon comptable m’a envoyé l’information de la CNESST : il n'y a pas d'âge ! », raconte Pascal Lamarche à Radio-Canada.

Ainsi, au Québec, il n'existe pas d'âge minimum contrairement à d'autres provinces. Seule une autorisation parentale est requise pour les jeunes de moins de 14 ans. Mais cette règle n'est en pratique pas toujours appliquée. 

« Je sais ce que c’est que les rushs. Souvent, le midi ou à l’heure du souper, on a beaucoup de commandes […]. J’aime l’ambiance. J’aime travailler et je trouvais que c’était une bonne place », explique fièrement Amanda à Radio-Canada. 

Selon la représentante nationale au syndicat des Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC Canada), Roxane Larouche, de plus en plus de jeunes travaillent dans les épiceries. Des chiffres également constatés par la CNESST. Ainsi, le nombre de blessures touchant les employés de moins de 16 ans a doublé entre 2018 et 2021. 

« On voit plus de jeunes, donc le risque de blessures existe et ça pose plein d’autres défis. C’est une toute nouvelle réalité. On pensait avoir des textes de conventions qui pouvaient répondre à toutes sortes de situations, mais force est de constater que non. […] Comment encadrer ces jeunes-là? Il faut trouver des solutions maintenant, car le problème, c’est maintenant qu’il arrive! […] On est dans une situation de jamais vu », explique-t-elle à Radio-Canada.

Elle s'inquiète également des risques de décrochage scolaire. 

« Un employeur qui a engagé un jeune d’environ 12 ou 13 ans se l’est fait voler par la scierie qui l’a embauché pour balayer à 26 dollars de l’heure. […] La question qu’on se pose, c’est : est-ce qu’on a ouvert la voie à un décrochage? [...] Ces questions doivent être analysées, car c’est un problème de société », prévient-elle. 

Certains jeunes arrivent également en classe après une nuit blanche à travailler dans un dépanneur. C'est le cas d'une jeune femme de 19 ans, Assitan, qui travaille de la sorte depuis 6 ans pour aider sa mère. « On est quatre enfants, elle est toute seule. Il y a des choses à acheter, mais elle n’a pas assez [d'argent] », justifie la jeune femme à Radio-Canada. 

Si jusqu'à 16 ans, les employeurs doivent prioriser l'école sur le travail, ils doivent d'ailleurs s'assurer que ces jeunes soient à la maison entre 23 h et 6 h. Mais selon Assitan, son patron n'a pas vraiment été compréhensif depuis son entrée sur le marché du travail. 

« Les employeurs vont te manipuler. Ils vont te faire sentir à l’aise. Il n’y avait pas un jour où mon téléphone ne sonnait pas. Ils vont dire "on t’aime" juste pour que tu fasses plus d’heures », illustre-t-elle. 

Une autre adolescente de 14 ans, Jemima, abonde en ce sens. « Tout ce qui est fast food, les boss ne sont pas compréhensifs. Moi, quand je disais que je ne pouvais pas rentrer au travail et que je devais étudier, ils me coupaient tous mes autres quarts. Je n’avais pas de quarts la semaine suivante », dénonce-t-elle à Radio-Canada.

Source: Radio-Canada