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La plus vieille usine de transformation de crevettes du Québec ferme ses portes.
Courtoisie  

La plus vieille usine de transformation de crevettes du Québec ferme ses portes.

Ça pourrait signifier la fin de la fameuse crevette de Matane.

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La plus vieille usine de transformation de crevettes du Québec ferme ses portes.

C'est lundi que l'entreprise danoise Royal Greenland a annoncé la fermeture de l’usine de transformation Fruits de mer de l’Est.

Selon l'entreprise, les facteurs qui ont mené à cette décision sont la chute du quota de pêche de crevette nordique, la pénurie de main-d’œuvre et les bas prix de marché pour les fruits de mer.

Alors que 55 salariés perdront leur poste, au moins 104 travailleurs étrangers temporaires se trouveront dans la même situation.

Le maire de Matane, Eddy Métivier, a réagi à la nouvelle en évoquant «une surprise totale». M. Métivier a rappelé lors d'une entrevue à La Presse que des millions de dollars ont été récemment investis par l'entreprise afin d'ajouter la transformation du homard et du crabe à ses activités, en plus de construire 71 unités de logement pour ses travailleurs temporaires: «On est sous le choc, c’est vraiment un coup dur. C’est un symbole pour Matane. C’est comme mettre une croix sur les traditions historiques de pêche. En ce sens-là, également, c’est un deuil. »

Le député péquiste de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé, n'a pas caché sa déception: «On croyait l’automne dernier avoir contribué à sécuriser l’usine parce qu’on a obtenu du gouvernement du Québec un contrat de transformation du homard, qui avait été d’abord refusé. […] Son emplacement est à proximité du port de Matane qui va avoir une cure de rajeunissement, un investissement de plus de 80 millions.»

C'est depuis 1982 que la crevette nordique est gérée par quota. Le quota attribué pour 2024 est le plus faible depuis le début de cette mesure.

La ministre fédérale des Pêches, des Océans et de la Garde côtière, Diane Lebouthillier, a fait remarquer dans une déclaration écrite que le réchauffement des eaux profondes du Saint-Laurent, la baisse d’oxygène dans l’eau et la prédation du sébaste sont des facteurs à considérer en ce qui concerne l'effrondrement des stocks: «La crise climatique, elle est réelle et ses effets se font déjà ressentir dans nos écosystèmes marins. La crevette en est victime, mais d’autres espèces sont appelées à vivre des perturbations similaires au cours des prochaines années. C’est pourquoi une réflexion plus large sur l’avenir des pêches s’impose.»

En ce qui concerne le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, André Lamontagne, ce dernier a demandé des « actions concrètes » de la part du gouvernement fédéral: «Cette fermeture démontre que nos entreprises de transformation au même titre que nos pêcheurs sont très sensibles aux dernières décisions prises par le gouvernement fédéral.»

Le directeur de l’Office des pêcheurs de crevette du Québec, Patrice Element, a reconnu pour sa part que les quotas affectent l'industrie: «La baisse des quotas drastique qu’on subit cette année du côté des pêcheurs, c’est sûr que ça affecte les transformateurs aussi. Logiquement, il n’y a plus assez de crevettes pour trois usines au Québec, ça, c’est sûr.»

Claudio Bernatchez, directeur général de l’Association des capitaines-propriétaires de la Gaspésie (ACPG), a ajouté: «C’est préoccupant parce que c’est un joueur majeur qui tombe dans l’industrie des pêches. [...] C’est un pan de l’histoire qui se termine et c’est là aussi où on voit que des entreprises comme celle-là qui deviennent la propriété de sociétés étrangères […] quand elles ont des choix à faire, c’est une décision purement économique qui est prise sans considération pour les travailleurs et l’impact que ça peut avoir dans une communauté.»

Enfin, Gaétan Myre, technicien en pêche et auteur, a rappelé que l'histoire se répète: «C’est le pattern de la Gaspésie, de toutes les régions ressources, que ce soit dans la forêt ou dans les pêches : des entreprises comme ça s’en viennent, elles exploitent et quand ça ne fait plus leur affaire, elles s’en vont. C’est le capitalisme.»

Source: La Presse